L'ASBL Mémoire d’Auschwitz organise à nouveau en 2016 un cycle de projection de films au Cinéma AVENTURE à Bruxelles. Thème de cette année : « La Zone grise. Héros ou criminels ? » ; SON OF SAUL sera le deuxième film projeté.


flyer cine club 2016 frNous prévoyons ce projet sous forme d’un ciné-club « PASSEURS D’IMAGES » avec quatre séances de projection de films de fiction.

 

Réservez la prochaine séance du ciné-club :

SON OF SAUL (Fils de Saul) – László Nemes (2015 / Hongrie / 107 min.)
Avec : Géza Röhrig, Molnár Levente, Urs Rechn...

son of saul webLászló Nemes immerge le spectateur dans l’usine de production de cadavres d’Auschwitz. Un film sans héros, sans émotion, sans survivant. « Les Sonderkommandos sont un angle intéressant pour être notre guide en enfer. Ils sont entre les tueurs et les victimes », explique le réalisateur.
Saul travaille en enfer. Ce n’est pas une formule, une métaphore, mais la terrifiante réalité. Saul fait partie d’un Sonderkommando à Auschwitz, d’un groupe de prisonniers juifs réquisitionnés à l’intérieur de l’usine d’extermination.
Un convoi arrive. Avec les autres Sonderkommandos, Saul, le visage fermé conduit les hommes, les femmes, les enfants du train vers la chambre à gaz. « Dépêchez-vous de vous déshabiller, de prendre une douche, la soupe va refroidir. » disent les hauts parleurs qui poussent le cynisme jusqu’à ajouter : « N’oubliez pas le numéro de votre crochet. » On presse, sans ménagement, les malheureux vers la pièce fatale. Et alors qu’on les entend hurler, les nazis crient « Schnell, schnell » à leurs esclaves qui trient les vêtements, vident les poches. Après, ils entameront leur travail macabre : évacuer « les pièces » comme disent les nazis, en glissant une lanière entre les épaules des cadavres pour les tirer et puis les empiler sur le monte-charge qui conduit au crématoire où ils seront enfournés. Pendant ce temps, d’autres damnés savonnent énergiquement « la salle des douches ».
Durant ce macabre manège, Saul voit le corps d’un garçon qui respire encore. Un médecin militaire s’approche du phénomène auquel il met fin de ses propres mains. Mais cette fois le visage de Saul marque une expression, une obsession. Ce garçon, c’est son fils, prétend-il. Il est prêt à prendre tous les risques pour l’enterrer religieusement. « Tu as abandonné les vivants pour un mort », lui dit « un collègue » qui prépare une révolte. Il sait que tous les membres du Sonderkommando sont éliminés après quelques mois. Saul ne l’entend pas, sa seule idée est : trouver un rabbin.
On croyait avoir tout vu sur la Shoah au cinéma, mais avec ce premier long métrage de László Nemes, on se rend compte qu’il n’en est rien. Le jeune cinéaste hongrois expose avec réalisme le fonctionnement de l’usine de mort, s’attachant aux rouages humains qui la faisaient tourner sous les ordres crachés par les Allemands.
Comme les Dardenne collaient la nuque d’Olivier Gourmet dans « Le Fils », Nemes serre la tête et les épaules de Saul, l’emprisonne dans un cadre carré. On ne voit que ce qu’il voit, mais rien ne nous est épargné. Ni la sortie des convois. Ni la pagaille. Ni les cadences hallucinantes de l’entreprise d’extermination. Ni les vêtements qui s’entassent jusqu’au plafond. Ni les petits trafics et les petits arrangements avec les SS. Rien, pas même les camions de cendres qu’il faut vider en les jetant à grandes pelletées dans le fleuve. Nemes montre tout, et surtout ce que l’esprit avait refusé d’imaginer comme la sortie des corps de la chambre à gaz.
Mais le choc ne s’arrête pas là, il est dans l’absence d’émotion, d’héroïsme. C’est frontalement qu’on regarde fonctionner cette usine de production de cadavres, qu’on suit Saul de la chaudière au crématoire. Confronté à l’horreur du matin au soir, il s’est cuirassé de toute émotion, il est un rouage qui obéit mécaniquement aux ordres, qui évite les coups. Mais le dernier souffle d’un corps va réveiller l’humanité en lui.
László Nemes réussit la prouesse exceptionnelle d’immerger le spectateur dans cet univers infernal, en traitant notamment l’image et le son à égalité. Une image chaotique, floue et un son, assourdissant mixage du bruit du four, des cris, des ordres… « Le Fils de Saul » montre qu’Auschwitz n’est pas le territoire d’héroïques survivants, ni le théâtre de l’émotion extrême, mais une usine où des hommes fabriquaient des cadavres.
Fernand Denis – La Libre

Bande-annonce officielle

Le film a gagné le Grand Prix au Festival de Cannes 2015.

Modalités pratiques :
Toutes les séances auront lieu à 19 h 30 au :
Cinéma AVENTURE
Galerie du Centre
Rue des Fripiers, 57
1000 Bruxelles

Prix : 6,00 €
Il n'est pas nécessaire de réserver vos places, vous pouvez prendre vos tickets à la caisse du cinéma juste avant la séance.

Plus d'informations sur le ciné-club 2016